2 mars 2021
2ème conférence de Carême – Père Marinko
Méditation du carême: le Père Marinko Šakota parle de la dimension mentale et spirituelle du jeûne
Date: 02.03.2021.
Pendant le Carême, la paroisse de Medjugorje et le centre d’information Mir Medjugorje préparent des méditations de Carême chaque mercredi. Le premier mercredi du Carême, le curé de Medjugorje, le Père Marinko Šakota, a parlé du jeûne, et il continue de le faire dans sa deuxième catéchèse en parlant de la dimension mentale et spirituelle du jeûne. Ci-dessous nous avons retranscrit la catéchèse, vous pouvez également la visionner avec l’accompagnement musical du Père Zvonimir Pavičić en cliquant ICI.
Des méditations d’une demi-heure seront préparées par le Père Stanko Mabić et le Père Ante Vučković.
Un des participants à la retraite de jeûne à la “Maison de la Paix” demanda au Père Slavko Barbarić: «Père Slavko, vous nous dites que le jeûne nous aide à trouver la paix, mais quand je jeûne, je suis nerveux, en colère contre les membres de ma famille, ma femme et mes enfants. Ne vaut-il pas mieux ne pas jeûner pour ne pas être nerveux, que jeûner et être nerveux? Le Père Slavko lui répondît : “Il vaut mieux jeûner et ne pas être nerveux.” Et puis il ajouta: “Si seulement les gens qui jeûnent étaient nerveux, il y aurait peu de gens nerveux dans le monde.”
Alors, qu’en est-il de ceux qui ne jeûnent pas et sont nerveux, en colère contre les autres, jurant …? Le jeûne ne nous rend pas nerveux et agité, mais nous aide à découvrir les causes de la nervosité et de l’agitation.
La Reine de la Paix nous enseigne que le jeûne aide à avoir la paix – la paix dans le cœur de l’homme, la paix dans la famille et la paix dans le monde. «Chers enfants, aujourd’hui encore, je vous invite à prier et à jeûner pour la paix. Comme je l’ai déjà dit, je vous le répète encore maintenant, petits enfants, seulement par la prière et le jeûne même les guerres peuvent être arrêtées. La paix est un précieux don de Dieu. Recherchez-la, priez et vous la recevrez. » (25 février 2003).
En parlant de jeûne, nous partons du fait que l’homme a besoin de nourriture et de boisson. Jésus lui-même ne pense pas que les gens n’ont besoin que de nourriture spirituelle. Au contraire, il a beaucoup de compassion pour les gens qui sont venus l’écouter dans le désert à cause de leur faim spirituelle. En ces jours-là, une foule nombreuse s’étant de nouveau réunie et n’ayant pas de quoi manger, Jésus appela les disciples, et leur dit : Je suis ému de compassion pour cette foule; car voilà trois jours qu’ils sont près de moi, et ils n’ont rien à manger. Si je les renvoie chez eux à jeun, les forces leur manqueront en chemin; car quelques-uns d’entre eux sont venus de loin.»(Mc 8, 1-3) De même, quand il ressuscita la fille de Jaïrus, Jésus n’oublia pas les besoins de son corps. « Jésus leur adressa de fortes recommandations, pour que personne ne sût la chose; et il dit qu’on donnât à manger à la jeune fille.. (Mc 5, 43)
En jeûnant (en abandonnant la nourriture et la boisson) nous ne dévalorisons pas la nourriture et la boisson! Parce qu’ils sont des dons de Dieu! On les redécouvre! En tant que don!
Mais en plus de la nourriture et des boissons pour le corps, l’homme a besoin de nourriture et de boisson pour l’âme, parce que l’homme n’est pas seulement un corps et n’a pas été créé uniquement pour ce monde. C’est pourquoi Jésus répond à Satan, qui veut dire que nous n’avons besoin de nourriture et de boisson que pour le corps: “Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu”. (Mt 4, 4) Par conséquent, dans le jeûne, nous ne nous arrêtons pas en surface, à prendre soin du corps, mais nous allons à l’intérieur et nous faisons des efforts pour l’hygiène de l’âme.
A cause des habitudes et des attachements, apparaît en nous un besoin de manger et de boire plus que ce dont nous avons besoin, de collecter des choses dont nous n’avons pas besoin. Il est absurde que nous puissions penser que tout va bien pour nous, que nous sommes libres, et en fait nous sommes devenus esclaves d’habitudes et d’attachements qui nous disent: «tu dois manger, tu dois boire de l’alcool, tu dois être quelqu’un aux yeux des autres, tu dois jouer aux jeux de hasard, tu dois regarder la télévision et ton téléphone portable, tu dois avoir de plus en plus … ». Attachés aux choses, nous sommes forcés de dire:« Mets ces gâteaux loin de mes yeux! Je ne peux pas les regarder sans les prendre. Eloigne ces cigarettes de mes yeux! Je ne peux supporter de ne pas fumer. Éloigne-toi de moi! Je ne peux pas te regarder ou t’ écouter sans m’énerver”.
Où est la solution? Échapper aux choses et aux gens ou les éloigner de nous-même? Le jeûne nous apprend à endurer! Le Père Slavko disait : “Quiconque apprend à vivre avec les choses peut vivre avec les gens.”
Le jeûne est le chemin de l’esclavage à la liberté par le renoncement. «Vous, petits enfants, êtes libres de choisir le bien ou le mal. C’est pourquoi je vous appelle: priez et jeûnez. ” (25 janvier 2008). Si une personne apprend à vivre avec les choses par le jeûne, sans prendre tout ce qui lui est offert et ce qu’elle veut, elle pourra vivre, être patiente avec les gens même lorsqu’elle est submergée par la nervosité, la colère … Ainsi, nos forces intérieures sont renforcées, car nous apprenons à patienter et à attendre. Et ce sont précisément ces forces mentales (patience, attente, ne pas prendre ce que l’on veut, persévérer dans l’espérance quand c’est difficile) que l’homme d’aujourd’hui perd facilement. Par l’ affaiblissement de notre force mentale, nous devenons incapables de surmonter les difficultés que nous rencontrons dans la vie (aux études, en famille, au travail, quand une croix apparaît dans la vie…)
Comment peut on reconnaître un manque, ou la perte des forces mentales? “Par exemple, désespérer dès que l’on se trouve dans une situation difficile … Beaucoup, par exemple, commencent à se droguer parce qu’ils n’ont pas de force mentale pour résister à la drogue.” (Père Slavko B.)
C’est particulièrement entre les conjoints que l’on peut voir si la force mentale est forte ou faible. «Personne n’épouse un homme qu’il n’aime pas. Pourtant il y a de nombreux divorces. Pourquoi? Peut-être que pour une chose particulière ils ne peuvent pas supporter leur partenaire. Ils n’ont pas la force de supporter l’autre et de lui pardonner – la famille s’effondre. (Père Slavko B.)
Si par le jeûne une personne apprend à vivre avec les choses, sans devoir les toucher, sans en être esclave, à être patiente même quand elle n’a rien (ou n’a pas tout), c’est-à-dire à ne pas prendre (toutes) les choses qu’elle veut, elle sera capable de vivre, d’être patiente avec les gens même quand elle voit leurs lacunes, leurs faiblesses, leurs erreurs, quand elle voit une paille dans l’œil d’un autre et est tentée de l’enlever dans les moments de colère et de nervosité.
Simone Weil nous dit : «Il se peut que le vice, la corruption et le crime représentent presque toujours une tentative de l’homme de manger de la beauté, de manger ce qu’on ne devrait que regarder. Ève a commencé. Si elle a fait tomber l’homme en mangeant le fruit, alors il faudrait un comportement opposé pour le salut de l’humanité, savoir regarder le fruit sans le manger. ”
Cela devrait être le sens de l’éducation au jeûne des enfants et des jeunes. Les enfants ne doivent pas jeûner au pain et à l’eau comme les adultes mais il est bon qu’un parent dise à ses enfants: «Ce chocolat est pour toi. Aujourd’hui, c’est vendredi, alors ne le mange pas aujourd’hui. Laisse-le pour demain. ” De cette façon, vous apprenez à l’enfant à être patient, à être capable d’attendre, à ne pas satisfaire tous les désirs qui surgissent en lui.
Jésus demande aux disciples de n’avoir que deux tuniques parce que c’est nécessaire. Mais pas plus ! Par le jeûne, nous nous libérons des contraintes en ne leur permettant pas de gouverner en nous. “Éteignez la télévision et laissez de côté toutes les choses qui ne sont pas bénéfiques pour vous.” (13 février 1986) Le jeûne fortifie en nous la parole «assez»: assez de dépendances et de coercitions!
Ainsi, l’espace de liberté intérieure se dilate en nous, c’est pourquoi nous pouvons alors adopter une approche différente de la contrainte et dire: je ne dois pas prendre d’alcool, je n’ai pas à jouer (aux jeux de hasard), je n’ai pas à jurer, Je ne dois pas réagir nerveusement, je peux vivre sans ça et ça …
Le philosophe Diogène mangeait du pain et des lentilles. Le philosophe Aristote qui vivait confortablement parce qu’il flattait le roi l’a remarqué et lui dit: “Apprend à être soumis au roi et tu ne vivra plus de cette nourriture misérable, de pain et de lentilles.” Diogène répondit: “Apprend à vivre de pain et de lentilles pour ne pas avoir à flagorner le roi.”
La Reine de la Paix nous avertit que le Malin existe, qu’Il veut nous soumettre, mais elle nous apprend que nous pouvons résister aux forces du Malin. «Satan essaie de vous imposer son pouvoir. Ne le lui permettez pas. Restez ferme dans la foi, jeûnez et priez. (16 novembre 1981)
Le jeûne est une aide pour atteindre une mise à nu. Jeûner signifie se dénuder, laisser tout ce à quoi nous nous sommes accrochés, ce en quoi nous avons confiance, ce qui nous sécurise et abandonnons-nous à Dieu avec une confiance de plus en plus grange. Contre le Serpent (symbole du Malin) qui est nu, nous ne pouvons pas nous battre avec des vêtements, dépendants des choses, de l’ego, mais seulement nus.
En jeûnant d’une part, nous disons non à l’esclavage intérieur aux choses et à Satan, et d’autre part nous disons oui à Dieu, nous choisissons la liberté. « En ce temps, je souhaite particulièrement que vous renonciez aux choses auxquelles vous vous êtes liés, mais qui font du mal à votre vie spirituelle. Ainsi, petits enfants, décidez-vous entièrement pour Dieu et ne laissez pas Satan pénétrer dans vos vies par ces choses qui vous font du mal, à vous et à votre vie spirituelle. .” (25 février 1990)
Ainsi, nous comprenons que le jeûne n’est pas seulement un combat contre le Malin mais il nous aide à renforcer notre foi, notre confiance en Dieu. « Chers enfants, je désire vous remercier de tout coeur pour vos renoncements de carême. Je désire vous stimuler afin que, d’un coeur ouvert, vous viviez encore le jeûne. Par le jeûne et le renoncement, petits enfants, vous serez plus forts dans la foi. (25 mars 2007) “Chers enfants, je vous appelle en ce temps à la prière, au jeûne et au renoncement pour vous rendre plus forts dans la foi.” (25 janvier 2021)
Le jeûne nous aide à différencier le nécessaire de l’inutile, ce qui est nécessaire pour la vie de la convoitise. Il y a des choses nécessaires à la vie: la nourriture, les boissons, des vêtements, un lieu où vivre… Mais il y a aussi le surplus de choses. Il y a aussi le désir d’avoir plus. Ce désir rend l’homme aveugle à ce qu’il a déjà.
Lors d’une retraite de jeûne et de prière, une jeune fille a réalisé que ses armoires étaient encombrées de robes. Elle avait des robes qu’elle n’avait portées seulement qu’une ou deux fois, et dans son désir de les acquérir, elle avait souvent beaucoup insisté auprès de ses parents. En mangeant du pain et de l’eau, ses propres yeux se sont ouverts pour qu’elle découvre le superflu qu’elle n’avait pas vu auparavant.
La Reine de la Paix nous invite à jeûner, à ouvrir les yeux sur tant de dons que Dieu nous donne chaque jour. « En ce temps de grâce du Carême je vous invite à ouvrir vos coeurs aux dons que Dieu désire vous donner. Ne soyez pas fermés mais, par la prière et le renoncement, dites ‘oui’ à Dieu et lui vous donnera en abondance. De même qu’au printemps, la terre s’ouvre à la semence et porte du fruit au centuple, de même, votre Père du Ciel vous donnera-t-il en abondance ». (25 févr.2006)
«Il en faut peu, très peu pour vivre» disait St. Leopold Bogdan Mandić . En Jeûnant, je me rends compte: « Je n’ai pas besoin de beaucoup pour vivre. Il ne me faut pas beaucoup pour être heureux. ” Le jeûne nous apprend la modestie et la simplicité de vie, et donc la liberté. “Il vaut mieux manger du pain avec de l’eau que de la tarte avec des ennuis.” (A. Soljenitsyne)
Sv. Paul est un exemple d’homme satisfait malgré les difficultés de la vie : « Non, je ne dis pas [cela] en raison de privations, car moi j’ai appris à être satisfait dans les circonstances où je me trouve.Je sais être abaissé, je sais aussi être dans l’abondance. En toutes choses et à tous égards, je suis enseigné1 aussi bien à être rassasié qu’à avoir faim, aussi bien à être dans l’abondance qu’à être dans les privations. Je peux tout en celui qui me fortifie ». (Phil. 4, 11-13).
Si nous avons plus que ce dont nous avons besoin, notre vie mentale peut être en danger parce que nous pouvons nous y habituer et ne pas voir ce que nous avons, augmentant ainsi le sentiment en nous que nous avons besoin d’encore plus. Et tout cela nous rend aveugles à l’essentiel et à l’important dans la vie. Ainsi, nous ne voyons plus «la seule chose nécessaire » dont Jésus parle à Marthe, et «la seule chose qui te manque» dont il parle au jeune homme riche.
Le jeûne est semblable à l’acte d’ ablatio, un sculpteur sculptant un rocher pour enlever l’excès, ce qui n’est pas nécessaire, afin d’en arriver à la statue qu’il voit dans le rocher. Le jeûne est ablatio, ablation, laissant de côté les choses sans importance qui occupent beaucoup notre attention et prennent du temps, afin de découvrir ce qui est important, la seule et unique chose nécessaire dans la vie. Le jeûne, c est devenir Marie qui était assise aux pieds de Jésus, le regardant et l’écoutant.
En jeûnant, nous apprenons à connaître Dieu et nous prenons conscience de la grandeur et de la profondeur de son amour pour nous. ” C’est pourquoi, petits enfants, armez-vous de la prière et du jeûne afin d’être conscients de combien Dieu vous aime, et accomplissez la volonté de Dieu.” (25 octobre 2008).
En plus de connaître l’amour de Dieu pour nous, le jeûne éveille en nous l’amour de Dieu, la faim, le besoin de Dieu et le désir de faire sa volonté. Jésus est un exemple d’une telle faim et soif de la proximité du Père et du désir de faire sa volonté: “Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre” (Jn 4, 34).
La Reine de la Paix nous enseigne que le sens du jeûne est de se rapprocher de Jésus : «Aujourd’hui encore, je vous invite au jeûner et au renoncement. Petits enfants, renoncez à ce qui vous empêche d’être plus proche de Jésus. (25 mars 1998) “Je désire, petits enfants, vous rapprocher tous de mon Fils Jésus, c’est pourquoi priez et jeûnez.” (25 juillet 2004)
Le désir de Jésus, de l’Époux, d’être proche de lui, est le sens du jeûne. «Or les disciples de Jean et les Pharisiens jeûnaient. Et ils viennent et lui disent : « Pourquoi les disciples de Jean et les disciples des Pharisiens jeûnent-ils, mais tes disciples ne jeûnent pas ? » Et Jésus leur dit : « Les fils de la salle des noces peuvent-ils jeûner pendant que l’époux est avec eux ? Aussi longtemps qu’ils ont l’époux avec eux, ils ne peuvent pas jeûner. Mais des jours viendront où l’époux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront en ce jour-là. (Mc 2,18-20).
Nous avons besoin du jeûne, parce que beaucoup de choses nous arrachent l’ époux, car beaucoup de choses nous éloignent de Jésus et de la prière. Jeûnons pour retourner à Jésus, de l’intérieur, avec le cœur, près de lui et semblables à lui, pour lui être proches.
Jésus nous enseigne qu’il est important que le jeûne ne soit pas un acte devant les gens mais uniquement l’expression d’une relation personnelle avec Dieu. « « Et quand vous jeûnez, ne prenez pas comme les hypocrites un air sombre, car ils donnent à leur visage un air épuisé pour montrer aux hommes qu’ils jeûnent. En vérité, je vous [le] dis : ils ont reçu leur récompense. Mais toi, quand tu jeûnes, oins ta tête et lave ton visage pour ne pas montrer aux hommes que tu jeûnes, mais [seulement] à ton Père qui [est là] dans le secret ; et ton Père qui voit dans le secret te récompensera. (Mt 6,16-18)
Si nous jeûnons devant Dieu qui voit dans le secret, et non devant les hommes, notre jeûne deviendra un acte pour les hommes. L’amour pour les personnes dans le besoin se réveillera en nous. S’il n’y a pas d’amour pour les gens en nous, c’est un signal clair que nous avons besoin de conversion.
Par le jeûne, nous nous vainquons nous-mêmes, mais pas pour que nous vainquions avec notre propre force – ce qui pourrait renforcer davantage notre ego – mais pour que nous puissions être de plus en plus abandonnés à l’Esprit Saint, pour qu’il nous guide,nous inspire et nous forme.